Une conférence captivante
Le jeudi 5 mars 2020, au Domaine Maizerets de Québec, avait lieu la première conférence de la Société Provancher en 2020. Nous avons eu la chance d’accueillir un entomologiste de renom, M. Jean-Philippe Lessard, Ph. D. Le titre de sa conférence était Les fourmis, ces petites bêtes qui mènent le monde.
Le Dr Lessard est professeur agrégé, spécialiste des fourmis au département de biologie de l’Université Concordia, à Montréal. À en juger par les interactions dans la salle et les nombreuses questions, il a su captiver l’attention des 39 personnes présentes. En une heure et demie, il nous a surpris en abordant de façon vulgarisée la biologie des fourmis, leur diversité et leurs rôles écologiques, de même que l’impact des humains et les quelques études québécoises traitant de cet important groupe d’insectes.
Une société organisée
De nombreux exemples tirés de ses recherches dans diverses régions du monde ont agrémenté la présentation. En termes de biologie, nous avons été à même d’en apprendre sur la composition des nids de fournis, dont on ne voit habituellement que l’ouverture, les castes composant les colonies, leur structure sociale, le cycle de vie des fourmis et la reproduction. Pour n’illustrer que quelques éléments surprenants de la biologie de ces insectes, on a pu apprendre que certaines espèces peuvent construire des nids gigantesques, même à l’échelle humaine. De plus, une colonie typique peut ne comporter que des femelles, une reine, des castes mineures (ouvrières) et majeures (défense) issues d’œufs fécondés. Les mâles, ailés mais plus petits que les reines également ailées, proviennent d’œufs non fécondés et ne sont habituellement produits qu’une fois par année. Ils ne vivent que quelques jours, le temps de féconder les reines produites au même moment lesquelles établiront de nouvelles colonies.
Une diversité étonnante
Actuellement, environ 12 000 espèces de fourmis ont été identifiées à l’échelle planétaire. Nous en observons 130 espèces au Québec. Sans surprise, la plus grande diversité se trouve dans les forêts tropicales. Les espèces les plus primitives sont prédatrices, parfois de grande taille.
La structure sociale des colonies varie considérablement entre les espèces. Chez certaines, les colonies ne sont composées que de quelques reines qui doivent alors chasser elles-mêmes. Cependant, chez la plupart des espèces, les colonies ont une structure sociale très élaborée. Certaines ne fabriquent pas de nid, préférant élaborer des bivouacs mobiles particulièrement impressionnants. D’autres ont développé des mécanismes de survie surprenants : stocker des réserves nutritives dans leur abdomen, 3-4 fois plus gros que le reste de leur corps, en vue de disettes éventuelles. Certaines découpent les feuilles des plantes en vue de cultiver des champignons qui leur servent de nourriture. D’autres encore élèvent des pucerons pour se délecter du miellat qu’ils produisent.
Les activités anthropiques, particulièrement le déboisement pour l’agriculture en milieu tropical, ont un impact négatif. Par leur action, les elles fournissent de nombreux services écologiques. M. Lessard a été impliqué dans une étude sur les fourmis associées à la culture du café où le rôle des fourmis est bien démontré. Elles contribuent à faire accélérer la décomposition de la matière organique, et ainsi le cycle des nutriments. Certaines espèces favorisent la dispersion des graines, la pollinisation des plantes, le contrôle d’insectes nuisibles.
Des références québécoises précieuses
En terminant sa présentation, M. Lessard a fait un clin d’œil à deux illustres chercheurs québécois qui l’ont précédé et inspiré dans le domaine soit l’abbé Léon Provancher et le Dr André Francoeur de l’Université du Québec à Chicoutimi. Le premier a décrit de nombreuses espèces à la fin du 19e siècle alors que les données recueillies lors du doctorat du second, dans les années 1970, permettent encore des publications scientifiques en 2020.
Félicitations et merci, Dr Lessard.
Réhaume Courtois, bénévole de la Société Provancher
Photo à la une : Peinture de Gaston Thiéry (1922-2013). Source : Internet.