Les Déry, une grande lignée de conservationnistes québécois

Le jeudi 14 novembre 2019, une conférence publique a eu lieu au Domaine Maizerets, à Québec, dans le cadre du centenaire de la Société Provancher. Le conférencier invité était M. Gaston Déry, ingénieur forestier, membre de l’Ordre du Canada en 2017. C’est devant un auditoire de 60 personnes qu’il a présenté sa conférence intitulée L’île aux Pommes et l’île aux Basques : deux îles sœurs.

Les Déry, une grande lignée de conversationnistes québécois

Depuis quatre générations, les descendants du Dr David-Alexis Déry (1883-1959), dentiste à Québec, agissent comme gardiens de l’île aux Pommes, une île rocheuse et herbeuse privée située à 5 km de la rive sud de l’estuaire maritime du Saint-Laurent. C’est cette île de 25 hectares qu’on aperçoit tout juste en amont de l’île aux Basques, une aire de conservation si chère aux membres de la Société Provancher. En 1927, le Dr Stanislas Gaudreau, beau-frère de l’aïeul David-Alexis, a acquis l’île aux Pommes, soit à la période où le Dr Déry participait avec neuf autres naturalistes québécois à l’assemblée de création de la Société Provancher d’histoire naturelle du Canada en 1919. Très engagé en sciences naturelles, cet écologiste avant l’heure planchait également à la création de la station de biologie de Trois-Pistoles et du Jardin zoologique de Québec.

Au début du siècle dernier, l’île aux Pommes était reconnue pour son abondance d’airelles rouges vigne d’Ida — un fruit semblable à une petite pomme de terre —, d’où origine le nom de l’île. Elle était alors dominée par des crêtes de schistes ardoisiers parsemées de graminées et d’arbustes rabougris dans les dépressions peu fertiles. Au printemps, durant la période de nidification et d’élevage des oiseaux marins piscivores, les goélands argentés et marins, et les cormorans à aigrettes y établissaient leurs colonies, contribuant de leurs excréments à la pauvreté du couvert végétal. En ce temps-là, très peu d’eiders à duvet y trouvaient de cachettes pour y dissimuler leur nid.

En 1980, M. Gaston Déry a hérité de l’île. Il avait épousé la cause de son père et de son grand-père alors qu’il passait ses étés d’écolier à Trois-Pistoles. Son intention était donc de la protéger à perpétuité et d’y permettre la recherche ornithologique, de même d’y réaliser un aménagement faunique et floristique propice à la reproduction de l’eider à duvet. En collaboration avec Canards illimités Canada et le Service canadien de la faune, un brûlage contrôlé a été réalisé. On y a ensuite ajouté de la terre dans les dépressions. Puis, on y a planté des végétaux adaptés au climat rigoureux du site pour créer des buissons broussailleux dans lesquels les femelles eider ont pu dissimuler leur épais nid duveteux. Leur nombre a explosé; plus de 3000 couples y ont niché en 2019.

En 2004, la réserve naturelle en milieu privé de l’île aux Pommes a été reconnue pour une durée perpétuelle en vertu de la Loi sur la conservation du patrimoine naturel du ministère de l’Environnement du Québec. Son statut particulier y autorise la récolte et la commercialisation du duvet d’eider, une pratique amérindienne séculaire. En échange de ce produit naturel aux qualités isolantes incomparables, les « gardiens de l’île » garantissent depuis quatre générations la protection de l’habitat de nidification des eiders. L’été dernier, la Société Duvetnor y a récolté 70 kilos d’édredon, soit tout juste 18 kilos une fois le duvet épuré! Bien que pratiquée à petite échelle, cette activité traditionnelle, lorsqu’accomplie avec discernement, génère des revenus qui autorisent davantage d’interventions en conservation de la biodiversité des milieux insulaires du Saint-Laurent.

L’île aux Pommes est une aire protégée sensible et ne peut être ouverte au public pour cause de conservation. Cependant, d’illustres chercheurs scientifiques et des journalistes scientifiques ont eu accès à ce paradis faunique, dont notamment le frère Marie-Victorin, Roger Tory Peterson, Austin Reed et Jean-Robert Faucher (de l’émission La Semaine verte; Le gardien de l’île, La planète des eiders et L’île aux Pommes en héritage). Toutefois, grâce à cette conférence, une soixantaine de personnes ont pu découvrir avec Gaston Déry toute la beauté de l’île — désormais propriété de ses deux enfants — et l’étendue de l’œuvre des Déry.  Par ailleurs, pour quiconque veut explorer les mystères de l’île au large du Pré de la vieille maison, il est possible de se procurer le livre intitulé L’île aux Pommes en héritage, un ouvrage multiauteurs abondamment illustré ou encore consulter le site de l’île aux Pommes.

Jean-Luc DesGranges, Ph. D.

Photo à la une: Nathalie Thivierge

L’île aux Pommes en héritage Crédit photo: Les Éditions GID

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