Une étroite relation entre la faune et les arbres

Une première conférence sur Zoom pour la Société Provancher

Le 15 octobre 2021, la Société Provancher a offert sa première conférence sur la plateforme de visioconférence Zoom. Cette activité s’inscrivait dans le cadre du 25e anniversaire de la réserve naturelle du Marais-Léon-Provancher située à Neuville. Elle résulte d’une collaboration étroite entre la Société Provancher et le Club des ornithologues de Québec (COQ). Le conférencier invité était M. Philippe Cadieux, Ph. D., chercheur postdoctoral dans le laboratoire de Pierre Drapeau au département de Sciences biologiques de l’Université du Québec à Montréal.

Un sujet intégrateur

La conférence « Les arbres sénescents et morts, des structures clés pour la conservation de la biodiversité au Québec » a été très appréciée par les quelque 70 participants. Le sujet était intégrateur, car parler de vieilles forêts nous amène à les voir comme des habitats avec les différents liens s’établissant entre les espèces qu’on y trouve.

Un conférencier passionné

Depuis 12 ans, M. Cadieux étudie l’utilisation des arbres par la faune cavicole, soit celle utilisant les cavités creusées par une grande variété d’animaux. Ce domaine de recherche fait l’objet d’études depuis plus de 20 ans au Québec. À l’échelle internationale, il retient également l’attention, en raison de la disparition des vieilles forêts partout sur la planète. C’est donc avec passion que M. Cadieux nous a présenté ce sujet et la façon dont il est étudié.

La dégradation des arbres

Pour comprendre l’utilisation des arbres par la faune et la formation de cavités, on doit d’abord caractériser l’état de la dégradation des arbres. Une échelle de cette dégradation avec multiples stades est utilisée par les chercheurs pour les classifier. Plus l’arbre accumule de blessures au cours de sa vie, plus il contient de micro-habitats et les décomposeurs, tels que champignons et insectes, entrent en scène. À chaque stade, les caractéristiques de l’arbre changent. L’essence de l’arbre, son âge, sa taille, la dureté de son bois et son milieu environnant sont autant d’éléments qui entrent en ligne de compte.

Les excavateurs de cavités

Après avoir identifié les caractéristiques des arbres en dégradation, il faut regarder les critères qui conditionnent les excavateurs de cavités. Le diamètre de l’arbre, la hauteur de ses cavités, son état de dégradation constituent trois critères importants. Par exemple, les sittelles et les mésanges sélectionnent des arbres hautement dégradés qui ont souvent de petits diamètres pour créer leurs cavités, tandis que le grand pic sélectionne des arbres de plus grand diamètre, sénescents ou morts, mais encore peu dégradés afin de les excaver. Rappelons qu’une cavité est plus qu’un tunnel d’entrée et contient une chambre pour accueillir les œufs.

Comment trouver les cavités et les étudier?

Pour qui s’intéresse aux cavités fauniques dans les arbres, c’est surtout au son et à l’observation de la quantité de copeaux au sol qu’on en trouvera en forêt. Toutefois, les chercheurs disposent maintenant d’outils plus sophistiqués pour mieux connaître leur utilisation par la faune cavicole.

À l’aide des caméras fixées au bout de longues perches mesurant plus de 15 mètres – dont l’utilisation relève de l’exploit –, ces chercheurs notent la présence d’espèces nidificatrices dans les cavités. De plus, grâce au laser, ils prennent des mesures de distance pour connaître les dimensions de l’entrée des cavités. Des petits drones de moins de 250 grammes sont aussi employés à l’occasion lorsque la perche ne suffit pas. Pendant sa conférence, c’est avec ses photos et ses vidéos de cavités habitées que M. Cadieux a su épater son auditoire. Il fallait voir les familles de petites nyctales, ratons laveurs et chouettes rayées dans leur intimité!

Les liens entre les espèces

Lorsque sont connus les liens entre les espèces, les chercheurs vont plus loin dans leurs travaux, car ils veulent établir des gradients spatio-temporels. C’est là que l’accumulation de données prises au fil du temps à différentes latitudes vaut son pesant d’or.

Les travaux de M. Cadieux et ses collègues de l’UQAM font ressortir que 95 % des observations de cavités fauniques en forêt boréale le sont dans le peuplier faux-tremble. Les excavateurs le choisissent, car il atteint rapidement des diamètres assez grands et le champignon Phellinus tremulae contribue activement à sa dégradation. Les pics y jouent un rôle important comme excavateur primaire. Généralement, ils occupent la cavité pendant une seule année. Par la suite, elle attire d’autres utilisateurs dits secondaires.

Les réseaux d’utilisateurs de cavités documentés

Durant sa conférence, M. Cadieux nous a présenté des résultats de façon schématisée. Ce fut toute une révélation! Les réseaux d’utilisateurs, tant primaires que secondaires, étaient illustrés en fonction des essences d’arbres.

Nous avons retenu qu’en forêt boréale les pics sont les principaux pourvoyeurs de cavités pour les utilisateurs secondaires et, dans le cas du grand pic, qu’il est un pourvoyeur de cavités de grande qualité. Plus au sud en forêt tempérée, les cavités non excavées formées par la dégradation naturelle prennent une place plus importante. En effet, elles sont utilisées par la moitié des utilisateurs secondaires. Autant dans le sud que dans le nord, les étangs créés par les castors constituent des milieux propices pour la faune cavicole.

L’importance de la conservation des habitats

Il est important de protéger des habitats où la faune cavicole peut trouver des arbres adéquats pour nicher. Autant dans la forêt boréale que dans la forêt plus méridionale du Québec, une prescription de 10 à 15 arbres fauniques laissés à l’hectare répondra au besoin.

M. Cadieux a conclu en insistant sur l’importance de la présence de structures clés telles que les arbres vétérans, arbres sénescents et morts de grande taille ainsi que des processus clés tels que la dégradation par les champignons et l’excavation de cavités par les pics pour le maintien de la faune cavicole dans nos forêts. Les processus écologiques clés de sénescence qui se présentent naturellement, mais lentement à mesure qu’une forêt vieillit, doivent être maintenus.

Pour en savoir plus sur le sujet

Pour revoir les notions présentées à la conférence Zoom du 15 octobre 2021, la présentation de M. Cadieux est disponible ici.

Élisabeth Bossert, bénévole, responsable des activités éducatives, Société Provancher

Photo à la une : André Bernard

Philippe Cadieux sera le conférencier invité le 15 octobre 2021 pour nous entretenir de l'importance des arbres sénescents ou morts pour la diversité forestière.
Philippe Cadieux, chercheur post-doctoral à l’UQAM et membre du Centre d’étude de la forêt (CEF). Photo: Philippe Cadieux.
Érable sélectionné par le grand pic afin d’excaver des cavités Photo: Pierre Fontaine
Les étangs où vivent les castors constituent des milieux propices pour la faune cavicole Photo: Élisabeth Bossert
Petite nyctale au Domaine Maizerets. Novembre 2018. Photo : Guy Trencia
Petite nyctale. Photo : Guy Trencia.
La chouette rayée est un oiseau nocture résidente à l'année longue à la réserve naturelle du Marais-Léon-Provancher. Somnolente le jour, mais bien à l'affut au cours de la nuit.
Chouette rayée. Photo : Clara Casabona i Amat.

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